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Chapitre prime : Une étrange rencontre.

 

 

(Registres du Bourgmestre de Windhowl, Tome VII - 4eme jour du mois des Grandes Pluies) …Voici l'histoire d’Eõl, sage druide de la Forêt du Nord, telle que nous l'ont retransmise les Ents…

 

Eõl n'a jamais été, à vrai dire, un amoureux de Dame Nature. Natif de la haute noblesse de Windhowl, il reçut une éducation convenable, et apprit les sciences et les Sept Arts de ses nombreux maîtres. Ses vingt premières années défilèrent ainsi, dans une douce quiétude agitée de temps en temps par des tournois et des bals somptueux. Cependant, il ressentait un certain trouble dans son existence….ou plutôt un manque. Oui, ces décadences que l'on appelait fêtes l'ennuyaient, il aspirait à une vie moins frivole et aisée. Curieuse réaction de la part d'un homme de condition…..peut-être l'appel de la Dame se faisait-il déjà ressentir ? Toujours est-il que c'est par une belle journée de chasse que lui apparut la chose la plus singulière qu'il ait jamais vu. Accompagné d'une escouade composée de ses hommes les plus fidèles, il arpentait un bois inconnu en quête de gibier.

 

La chasse n'avait jamais été son fort : maladroit à l'arc, il se sentait plus à l'aise avec un grimoire qu'avec une lance, et par dessus le marché, il n'avait jamais réussi à tuer une bête. Cependant, la chasse était une obligation due à son rang, et il fallait se résigner à rapporter au bourgmestre quelques peaux d'antilopes. Le jeune Eõl était versé dans l'art de la magie, et préférait l'usage de l'esprit à celui de la matière. Il passait ainsi des heures à s'abreuver de connaissances à la maison des mages de Windhowl, car son désir d'atteindre la Sagesse était ardent.

 

Mais ce jour-là, décidé de montrer à tous qu'il serait capable de ramener du gibier, il se mit à suivre - sur un coup de tête idiot et indigne d'un sage ! - une antilope, et, bien sûr, il ne l'attrapa jamais. Isolé du groupe, il pesta de sa folie et tenta de recouvrer ses esprits. Alors Elle lui apparut. Il se trouvait près d'une clairière, et elle en profita pour se révéler. La Dame, celle que les elfes appelaient Titania, sortit de l'étang. Tout d'abord, l'on eut cru voir une fine brume, presque irréelle, qui s'élevait comme une fumée mystique au dessus du sol. Puis une forme féminine émergea de la colonne brumeuse pour se montrer. A la vue de cette apparition surnaturelle, Eõl tressaillit. "Ne crains rien, mortel. Tu as été choisi." Le jeune mage ne put parler, tant il était hébété.

 

 

 

 

"Écoute moi, jeune Eõl. Le monde vit sous le joug d'une menace. D'une terrible menace. Et seule la Nature pourra sauver l'humanité". "Je t'ai choisi", reprit-elle, "pour ton aptitude à maîtriser la magie. A partir de maintenant, tu seras druide, tu renieras Syl, et tu serviras ma cause. Je sais que tu ne peux refuser. Toute ta vie tu as attendu mon appel, tu exècres trop ta vie vaine et futile pour oser m'abandonner". Ce faisant, elle lui adressa un sourire doux et réconfortant qui enivra le nouveau druide : il ne pouvait résister à cet appel. De toute façon, l'opportunité était trop belle. Il acquiesça d'un signe de la tête. "Voilà quelques instructions. Au nord-est d'Arakas, se trouve un cercle d'initiés, un stonehenge. Là-bas tu rencontreras un esprit druidique, Grim Noirdésir. Avec lui, tu fonderas une compagnie qui aura pour but de préserver la mémoire des hommes. Vous errerez de villes en villes, racontant des histoires, déclamant des poésies et réconfortant les petites gens, et vous le ferez jusqu'au Jugement du Monde. Va maintenant." Et c'est ainsi qu’Eõl partit vers les sinueux chemins de sa destinée.

 

On ne le revit jamais à la cour de Windhowl.

 

 

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Chapitre second : Sur les chemins d’Althéa

 

 

(Carnets d’Eõl, retrouvés dans une auberge de Silversky - Solstice d'été.)

 

Trois ans…Trois années d'errance dans les rangs de la Compagnie du Poisson-Chat que je m'en vais vous conter…Je me nomme Eõl’Jarion de Lestril, fils d'Irïn de Lestril. Mais de grâce, appelez moi Eõl, tout simplement…Comme je vous l'ai déjà sûrement appris, je suis natif de la Haute Noblesse du duché de Windhowl. Certains à la Cour me trouvaient étrange dans mes manières…" Ce garçon est bien mystérieux ", chuchotait-on, " Ses origines sont obscures, il aurait des ancêtres nains !" Je ne comprenait pas pourquoi ces emplumés me rejetaient…ma différence faisait de moi un paria…Toujours est-il qu'après mon entrevue avec Titania, belle dame des Ondées, j'ai quitté Windhowl et je me suis mis en route vers le Nord, selon ses instructions…

 

Errance…Liberté…Une vie de saltimbanque claire et heureuse…

 

J'ai rejoint la Compagnie du Poisson-Chat. En compagnie de Grim le Veneur, nous avons vite fait de recruter des gens de tous les horizons, comme l’artiste althéen qui se faisait appeler Requiem. Avec ces compagnons de fortune j'ai découvert le monde et je me suis forgé ma philosophie quotidienne. J'ai appris à vénérer Brehan, Dieu Courage, qui me permet de porter une lourde armure sur mes frêles épaules ; Syl, Maîtresse des Mystères, qui soutient mon bras au quotidien et me permet d'invoquer les arcanes les plus secrètes ; je chantais des louanges à Sélène, Ombre parmi les ombres, qui règne sous le manteau de la Nuit que j'aime tant. Mais cependant, s’il est un dieu que j'admire et que je vénèrerai jusqu'à ce que la Faucheuse m'emporte, c'est bien Iago. Depuis que la Dame m'a guidé vers la Compagnie, le Collectionneur m'a placé sous sa protection : je me suis mis à étudier l'Art des Rimes et des Chansons avec des sylphes des bois pour devenir barde. Alors que Requiem me contait les merveilles de Iago, je m'endormais chaque soir avec la conviction que je mènerais toujours une vie heureuse, faite d'errance et de poésie.

 

 

 

 

Un jour où je me promenais dans la plaine du Grand Nord, je fis une rencontre toute particulière : alors que je m'affairais à cueillir des baies, un homme se présenta à moi. Ses cheveux blonds et clairs luisaient sous la pâle aurore, et recouvraient un visage dur et ferme. L'homme était vêtu d'une simple tunique et portait un haubert qui semblait dur comme la pierre. Une hache pendait à son ceinturon. Mais si l'homme paraissait impressionnant, il l'était toutefois moins que le loup qui l'accompagnait ! Oui, un loup était là, paisible et majestueux. On ne le distinguait guère, dans le manteau humide de l'aube, car seules les pupilles perçantes de son œil luisaient d'un jaune éclatant. L'homme s'adressa à moi en ces termes : "Isenfil ne gronde pas à ton approche…cela signifie que tu n'es pas mauvais…je me présente, je suis Kern, et je me rends à Lighthaven pour y apprendre les rudiments de l'escrime. Est-ce qu'il te plairait de m'accompagner ?"

 

Apparemment je répondis oui, puisque depuis ce jour nous arpentons les chemins d'Arakas et de Raven's Dust en suivant la voie qui nous incombe, moi celle des arcanes et lui celle des armes. Pas très fin, très barbare dans sa manière de combattre, c'est indéniable, Kern n'en est pas moins un homme raffiné, un mécène qui n'hésitera pas à dépenser des sommes considérables pour quelques vers ou pour un portrait...Un allié précieux de la Compagnie, vous l'aurez compris !

 

La vie continuait ainsi, de façon lente mais jamais monotone. Nous donnions des représentations dans les plus grandes villes, et ainsi nous avons vu défiler, au fil des ans, un nombre incroyable de ducs, barons ou vicomtes qui se pressaient pour nous admirer à l'œuvre sur les planches des théâtres althéens.

 

Je me suis également attelé à une bien noble tâche, c'est à dire agrandir la Compagnie : les maîtres se sont entourés d'élèves, et c'est ainsi que je fis la connaissance de Dame Jhaela, dont la valeur et le sens artistique ne sauraient être mis en cause…

 

Maintenant, je me consacre à la vie communautaire et à nos chers citoyens : Fraîchement nommé prêtre de Iago et garde royal, j'essaye chaque jour d'apporter la justice dans un monde dominé par des croyances superstitieuses…Mais je sais qu'un jour cela cessera, car le cri de la liberté rugit en moi comme l'eau dans un torrent…

 

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Chapitre troisième : Transcendance

 

 

(Salle des Fêtes de Stonecrest - Année de la Grande Trêve)

 

« Eh oh les gamins, faudrait penser à dessoûler ! Regardez moi tous ces fûts de bière que vous venez de me vider ! »

 

La salle des fêtes de StoneCrest, capitale du Royaume de Goldmoon depuis que notre bon Roy Théodore le XVIeme l'avait décrété, ressemblait ce soir plus à une taverne qu'à autre chose. C'était un bouge immonde où s'entassait toute la populace des bas quartiers, contente de célébrer la Trêve établie avec les peuples Skraugs. Tandis que le vieux Gundhar, barde à la retraite reconverti en tavernier, s'affairait avec mes soûlards de frères, je restais dans un coin de la salle, muré dans mon mutisme.

 

« Calme, l'vieux, calme…*hic* »

 

« Ouais…*hips* On veut juste..juste..s'amuser ! Ouais !!! »

 

« Eh ! L'vieux Gundhar ! Tu nous racontes l'histoire du barde, là, Eõl ! Ouais, celle que tu…*hips*…essayes toujours de finir avant qu'on s'écroule sous les tables de la taverne ! Hin hin hin ! »

 

« Hum …soit. Vous avez intérêt à être attentifs cette fois-ci, garnements ! Attendez que je sorte mes parchemins …voilà ! Lors de votre dernière cuite ( hem ! ), j'essayais de vous raconter comment Eõl était devenu un barde itinérant, et ce qui l'avait amené à devenir garde royal …écoute maintenant, peuple de Stonecrest, le plus grand moment de la vie d’Eõl ! »

 

Alors que le vieux commençait son récit, je m'approchais, m'affaissant sur une chaise en cèdre pour écouter une part des récits qui circulait sur un barde très célèbre, qui avait vécu au temps de sa Majesté Théodore le XIIIeme, alors que Stonecrest n'était qu'une minuscule colonie …Le vieux se plaisait à conter à qui voulait l'entendre ces fables qui avaient survécu à l'épreuve du temps. Alors qu'il débutait, l'activité fiévreuse de la salle se brouillait dans mon esprit, et le son des voix mourait dans les épaisses fumées des pipes à tabac des voyageurs…

 

 

 

 

"Fort bien, qui veut commencer ?" La voix tonitruante de All, Grand Marchand de Iago, venait de retentir sur la place de Lighthaven. Les prétendants jetèrent un bref regard vers l'homme en robe blanche, qui avait été désigné pour être le président du Jury. En effet, c'était en une belle journée d'hiver qu'une dizaine de personnes s'étaient dirigées vers la baronnie pour tenter de devenir Barde Royal du Royaume de Goldmoon. Parmi eux était un homme petit, vêtu d'une armure de mailles et d'un chapeau de cuir vert. Il était accompagné d'hommes en armes, ses frères de combat, qui étaient venus l'encourager : Eõl, car c'était lui, envisageait depuis fort longtemps de venir vivre à la Cour pour chanter ses œuvres devant le Roy…C'était là une occasion unique pour le garde, qui composait souvent dans les dortoirs de la caserne, entre deux entraînements avec Lycaos, mage royal, et Rathen, archimage de Syl. Près de lui étaient de nombreux amis poètes, comme Naeth, Muse de Iago, qui venait comme lui pour décrocher le titre.

 

Et comme le barde avait retenu les leçons des muses des Bois, il se fit fort de triompher de ses concurrents, dans une lutte non pas sanglante, mais tout aussi âpre que le serait un combat à mort ! Cela c'était passé au cœur de l'hiver, le pays entier était plongée dans un blanc manteau de neige, et Eõl s'en souvint toute sa vie : sous les vivats de ses proches et des badauds de Lighthaven, il était enfin nommé barde royal ! Il allait enfin connaître le faste de la vie à la Cour, enfin côtoyer les autorités du pays ! Il allait également quitter la caserne, puisqu'il devait abandonner son titre de garde pour assurer ses nouvelles fonctions au palais. Il quitta ainsi ses frères d'armes, et commença une nouvelle vie, suivant les recommandations de Kern qui lui conseillait de se méfier des manigances des nobles.

 

Des années, il resta là-bas. Des années, il vécut reclus, loin du monde, composant pour les hautes instances et perfectionnant ses compétences de mage. La vie s'écoulait d'une manière morne, et quelquefois, lorsqu’il voyait le Capitaine décapiter un gobelin dans la cour du palais, il se mettait à regretter les temps anciens. Il sentait que sa vie basculait, il mais ne pouvait rien faire. Requiem était reparti dans les îles de Sumner, et Jhaela, rendue démente par la faute de l'haruspicien Oniros, avait été tuée dans des circonstances mystérieuses. La solitude envahissait Eõl, qui devenait distant et parfois même médisant. Influence de la Cour ? Certainement. Les pucelles de Silversky s'offusquaient devant sa misogynie, on se demandait comment cet homme froid avait pu un jour écrire des poèmes d'amour. Plusieurs fois les nobles s'étaient plaints de son attitude scandaleuse, mais il s'en sortait toujours, car il avait les bonnes grâces du Roi. Il faisait bonne figure en société, c'était un prêtre de Iago exemplaire, mais la vue de cet homme devenu vieux et aigri au fil des années provoquait maintenant la peur.

 

Il décida un jour de partir dans petite colonie de Stoneheim pour se changer les idées. Les chasseurs bréhanites le voyaient errer des heures dans les vallées, inspectant les fleuves, remuant ciel et terre, et rentrant dépité à la taverne, tous les soirs. C'était un tableau pitoyable que cet homme courbé et grisâtre, qui avait peine à marcher, et qui semblait chercher quelque chose, ou quelqu'un. Les jeunes du pays prophétisaient d'un ton ironique sa mort prochaine, car ce n'était plus le jeune barde que tout le monde avait connu qui se traînait dans les rues de Stonecrest, mais une véritable loque humaine.

 

Toujours est-il que c'est la dernière fois que l'on vit Eõl-le-Vieux arpenter les couloirs du palais de Silversky. On n'eut plus de nouvelles de lui pendant des semaines. Etait-il allé consommer ses derniers jours dans une montage du pays ? Etait-il mort ? Qu'importe. Le royaume, lui, se mettait à renaître à l'approche du printemps, et Eõl était oublié depuis longtemps lorsque les premières fleurs se dressaient sur les parterres de Lighthaven.

 

Pourtant une folle rumeur courait depuis quelque temps : on disait que le barde avait obtenu une faveur d'Artherk, celle d'aller vivre quelques temps dans le palais de Iago, qui se trouve au-delà du monde connu ! Il était vrai que récemment, on avait vu des humains quelque peu...spéciaux, puisque ceux-ci arboraient, fièrement ou non, une paire d'ailes dans le dos…On disait que ces élus étaient des pions sur le grand échiquier de la bataille entre l'Haruspice et les Dieux, mais personne ne pouvait le prouver, et de folles suppositions couraient sur le compte du Vieil Eõl. Ces suppositions se sont révélées fondées, puisqu'un jour, un homme presque nu, extrêmement jeune, et ailé, fit irruption dans le temple de la baronnie. Son visage plaisant inspirait la confiance, et quand quelques curieux lui demandèrent sa profession, il se virent répondre que l'être ailé était un barde. Un nouveau barde dans le pays ! Grande nouvelle ! La surprise vint quand le "séraphin" - c'était ainsi qu'ils se désignaient - leur indiqua son nom. Eõl.

 

Ainsi c'était vrai, comme il l'expliquerait plus tard : accueilli au palais céleste, il reçut la jeunesse et une espérance de vie énorme, ainsi qu'une paire d'ailes qui serait un témoignage de sa transcendance. Ses anciens compagnons le regardaient d'un œil nouveau et intrigué, puisqu'il faisait dorénavant figure de jouvenceau à la Cour. Mais ce n'était pas pour déplaire à tout le monde, car il avait regagné sa verve et son habileté ! Il se plongeait avec une joie non dissimulée dans les jeux cruels de la Cour, composant des pamphlets, faisant pencher la balance des grâces royales à sa guise, en se jouant des autres nobles. Un mois plus tard, sa popularité était déjà si grande qu'on en entendait parler dans les vallées du Nord d'Arakas. Cependant, sa nouvelle condition inquiétait ses anciens compagnons, car le timide Eõl qu'on avait connu avait bel et bien disparu. Il avait gagné en charisme ce qu'il avait perdu en humanité, il avait gagné en force ce qu'il avait perdu en intelligence. Il faisait d'ailleurs preuve d'une violence inouïe, et il s'entraînait chaque jour dans la caserne, préférant l'usage des masses et des fléaux à celui des arcanes…

 

(…)

 

J'arrêtais le vieux Ghundar. "Mais enfin, si je comprends bien, l'esprit d’Eõl était mort? Il n'était plus lui même? " Que nenni, fiston, que nenni. Disons simplement que son âme avait été exacerbée par la folie provoquée par sa précédente vie. Mais il restait le même Eõl, il composait les mêmes œuvres, buvait la même bière…Tu comprends, ce qu'il a pu voir chez le Grand Iago dépasse notre entendement…qui sait ce qu'il a vécu là-bas ? Qui sait ce que l'Oracle a pu lui dire ? Disons que pour sa nouvelle existence, Eõl avait décidé de vivre...pleinement sa vie." Et c'est ainsi que se finit l'histoire, Ghundar ? Eõl était devenu immortel? " Que vas tu penser là ? Non, bien sûr que non ! Il lui restait encore bien des choses à accomplir, mais ceci, je vous le raconterai dans une prochaine veillée…Regarde moi tes frères ! Tous endormis !!! Pff, soûlards ils sont, soûlards ils resteront ! Allez dégage petit, on ferme !

 

 

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Epilogue

 

 

Eõl le barde avait changé de nature en subissant l’épreuve de l’Oracle. Il survécut, mais il perdit la raison, car il souhaitait plus que tout demeurer auprès de son dieu plutôt que de retourner sur cette terres des mortels qui l’avait tant déçu. Le reste de son histoire n’est pas clair : il aurait contacté des organisations malfaisantes pour nuire aux hautes instances royales, mais, trahi, se serait exilé vers le royaume lointain d’Angélus. Une chose est certaine, c’est là qu’il fit la connaissance de Maedevan Maeght, barde et roublard de son état, qui tenta de tuer Eõl au détour d’une ruelle. L’audace de l’entreprise plut au séraphin, qui fit de Maedevan son apprenti et son héraut dans le royaume de Goldmoon. L’espion se fit fort, tout le long de son séjour, d’exécuter les ordres de son maître et de mettre sur pied une secte de iagonites maléfiques. L’entreprise réussit, les clergés officiels de Silversky furent grandement affaiblis, et Maedevan retourna auprès de son maître pour nuire cette fois-ci au pouvoir angélusien. Maedevan Maeght et Eõl Graverune trouvèrent tous deux la mort lors de l’accomplissement de la Quatrième Prophétie, qui consacra la Venue de l’Haruspice et qui mit fin à l’existence de la race humaine.

 

 

 

 

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Addenda : Poésies et œuvres des bardes maudits

 

La Caravane

 

Dans le feu chatoyant danse notre mémoire

Sur les pierres fatiguées nous nous sommes assis

Hardi, compagnons ! C'est assez aujourd'hui

Arrêtons nous ici pour contempler le soir

 

Bande fière et joyeuse, stoppe là ton chemin

Allume les lanternes et calme les chevaux

Demain la route est longue, et par monts et par vaux

Tu devras raconter les chants des baladins

 

Maintenant tout est sombre, et l'Ancien s'est assis

Devant le feu de camp où les reflets s'amusent

Il s'apprête à transmettre l'art sacré des Sept Muses

A tous les ménestrels qui sont ses apprentis

 

Ainsi va commencer l'éternelle saga

Qui se terminera dès le lever d'Hélios

Il faut se préparer, voici venir les noces

Le matin et la nuit s'unissent ici-bas

 

Si un jour vous croisez ces joyeux troubadours

Sur les clairs chemins de la belle Althéa

Écoutez leurs histoires qui racontent  la foi

Qui content l'espérance et qui chantent l'amour...

 

(Eõl de Lestril)

 

 

 

Riverside

 

C'est une fière cité aux reflets chatoyants

Baignée dans la douce lueur des ondines

Lentement des ruelles une froideur sibylline

Émane à travers les beaux chants des enfants

 

C'est une vieille musique aux notes argentées

Qui berce sylphes et dryades et sirènes

Qui hante les canaux où les rimes sont reines

C'est un vieux refrain âgé et usé

 

Ô fière étrangère aux doux yeux de diamants

Ville bénie des dieux et frappée de fortune

Ô précieux anneau serti par la Lune

Tu m'as hypnotisé par tes charmes d'antan

 

(Eõl de Lestril)

 

 

 

Petites prosopopées pour Sélène

 

Le Vol

 

Partout je suis haï, partout je suis hué,

Les marchands et les gardes jettent l'opprobre sur moi

Moi, fierté des filous et fléau des cités,

Soit bénie ma déesse, je ne vis que pour toi !

 

Le Silence

 

A l'heure la plus secrète des chagrins les plus sourds

Sur les champs de bataille j'étends mon noir manteau

Des plus grands crépuscules, des plus tristes amours

Partout je triomphe et fais mourir les mots.

 

Le Meurtre

 

Les gens disent que je suis le plus affreux des crimes

Est-ce possible, dit-on, de tuer de sang-froid ?

Je ne suis qu'un poème où le sang est une rime,

Soit bénie, Ô Sélène, je ne vis que pour toi !

 

La Nuit

 

Je recouvre le ciel de mon manteau de moire

Je protège les mendiants, je protège les masqués

Mon enfant, prends cette dague, va donc tuer ce soir

Tu vaudras mieux, c'est certain, que des centaines d'épées.

 

(Maedevan Maeght)

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